Parce que nous sommes WEIRD (étranges)…

En quoi se distinguent les principes d’éducation de peuplades ancestrales de nos principes d’éducation ? Qu’est-ce qui fait que nos cultures WEIRD (Western-Educated-Industrialized-Rich-Democratic) ont des résultats très discutables en matière d’éducation ?

Michaeleen Doucleff s’est posé ces questions alors qu’elle rencontrait des difficultés relationnelles persistantes avec sa fille de 3 ans. Journaliste, elle a décidé de partir en quête de ce que des peuplades ancestrales appliquaient comme principes dans l’éducation de leurs enfants. Elle partage ses découvertes dans un ouvrage passionnant.

Chez les Mayas, Michaeleen découvre que les enfants ont un besoin fondamental de coopération, et que ce besoin doit être entretenu afin de ne pas s’éteindre. Dans nos cultures WEIRD, nous avons tendance à trouver des occupations pour nos enfants pendant que nous nous occupons des « choses importantes ». Chez les Mayas, les enfants sont régulièrement invités à participer à ces choses importantes, et ils ont tendance à en redemander spontanément.

Chez les Inuits, l’auteure découvre l’intelligence émotionnelle dès le plus jeune âge. Les adultes sont capables de maîtriser leurs émotions et s’adressent toujours aux enfants de manière posée, quel que fût leur comportement. Ils savent que les fonctions exécutives (Système 2) de leurs jeunes cerveaux ne pas encore développées. Il est donc normal que ceux-ci fassent des « bêtises » et aient des comportements inappropriés. Ils expliquent que crier sur un enfant est ridicule car cela a pour conséquence d’inhiber complètement ses rares fonctions exécutives, ce qui a pour effet de fermer les canal de communication et de rendre la situation encore plus difficile.

Chez les Hazdas, Michaeleen découvre l’autonomie. L’autonomie au sens de l’interdépendance, à mettre en opposition avec l’indépendance égotiste. Chacun, dès le plus jeune âge, apprend quelle est la mission du groupe et agit en fonction de ce qu’il estime être favorable à l’atteinte de l’objectif commun. Les enfants bénéficient de nombreuses libertés, pour autant que leurs agissements soient utiles au collectif.

Coopération. Intelligence émotionnelle. Autonomie dans la recherche de l’objectif commun. Voilà autant de compétences utiles dans n’importe quel collectif, fût-il professionnel, sportif, associatif, familial, etc.

Et quelles sont les conséquences de ces comportements ? Bien-être, performance, efficience, et une spirale de renforcement positif au bénéfice du collectif...

L’après Covid-19. Quelles responsabilités pour votre entreprise ?

Nous approchons d’un début de déconfinement. Pour la majorité d’entre nous qui avons été forcés à rester cloîtrés depuis plus d’un mois et demi, notre occupation professionnelle sera l’une des première occasions de renouer avec une « réalité » tangible.

Autour de nous, certains sont zen et traversent cette situation inédite avec recul. Mais d’autres personnes sont inquiètes, apeurées, méfiantes, perdues ou encore endeuillées. Ces personnes auront besoin de s’exprimer et d’être écoutées. Elles ne pourront pas retrouver leur potentiel tant que cette étape n’aura pas été franchie, parce que leur cerveau sera bloqué en mode limbique.
Il reviendra donc à nos entreprises de créer l’espace nécessaire à l’expression de ces émotions, étape incontournable comme préalable à la reprise progressive du travail effectif. Progressive parce que ce travail d’accompagnement risque d’être long et itératif. Et ce travail ne s’improvise pas, cela se prépare. Les discussions devront être cadrées par des collègues compétents. Les outils de débriefing constituent une bonne base de préparation.

Il reviendra à nos entreprises de créer l’espace nécessaire à l’expression de ces émotions

Ensuite, comment procéder pour redonner à chacun l’envie de faire du mieux qu’il peut ? Comment faire en sorte que nos collaborateurs soient motivés ?

Ici encore, je vous propose de faire différemment – pour la plupart des entreprises. Et si l’on se disait que c’était l’occasion de redémarrer sur d’autres bases, plus humaines, plus saines, procurant davantage de sens. De changer de paradigme, mais cette fois, pour de vrai. Fini la poudre aux yeux, la machine expresso, la salle de fitness et les séminaires trop ludiques. Cette fois, il faudra y mettre les trippes, à commencer par l’équipe dirigeante. Il faudra que celle-ci apprenne à prendre soin de ses forces vives comme de son atout le plus précieux. Il faudra que nos dirigeants, tout en continuant à gérer nos entreprises – les coûts, la qualité et le timing -, développent de réelles compétences en leadership pour intégrer l’humain dans l’équation.

Il faudra que nos dirigeants, tout en continuant à gérer nos entreprises – les coûts, la qualité et le timing -, développent de réelles compétences en leadership pour intégrer l’humain dans l’équation.

Concrètement, que mettre en place ?

Les quelques pratiques que je propose ci-dessous sont extraites de mon livre « Mieux Réussir Ensemble ». Je ne les détaillerai donc pas, je vous encourage à vous y référer.

  • Définir et publier une vision et des valeurs partagées dans toute l’entreprise, de façon à ce qu’elles soient un guide dans toutes les décisions à prendre. Si certains ne s’y reconnaissent pas, écouter leurs propos. Et si leurs idées ne sont pas compatibles avec la vision de l’entreprise, envisager de s’en séparer, car ils seront des freins probables.
  • Définir et expliquer le ou les objectifs communs de l’entreprise et donner la parole ; accueillir les critiques, les remarques et les suggestions.
  • Développer l’intelligence émotionnelle de tous les collaborateurs, à commencer par l’équipe dirigeante et les managers.
  • Développer les compétences en gestion du stress, en communication et en gestion de la charge de travail de tous les collaborateurs.
  • Avoir le courage de reconnaître ses erreurs et ses faiblesses. Arrêter de prétendre. Encourager tout un chacun à dire « Je me suis trompé« , « Je ne sais pas » ou « J’ai besoin d’aide » quand c’est le cas.
  • Responsabiliser toutes les personnes par rapport à leur travail. Eviter le micro-management et leur faire confiance. Les aider à développer leurs compétences lorsque nécessaire.
  • Mettre en place une « culture juste », impliquant le droit à l’erreur. Cela encourage à la créativité et à développer des solutions innovantes.
  • Instaurer une culture de feedback à petite et grande échelle, afin de ne pas reproduire les erreurs et de développer une culture d’apprentissage.
  • Fixer les objectifs en accord avec le ou les intéressés, et plus de manière arbitraire. Viser une progression continue plutôt qu’une deadline, arbitraire elle aussi.

Cerise sur le gâteau, l’amélioration du bien-être de vos collaborateurs, qui résultera de la mise en oeuvre de ces bonnes pratiques, aura un effet bénéfique sur la performance technique et économique de votre organisation.

Vous avez une occasion inédite de sortir de votre zone de confort, pour votre bien et celui de vos collaborateurs. Qu’en ferez-vous ?

L’art de dénouer les conflits

– Bonjour voisin. Dites-moi, cet arbre prend de plus en plus d’ampleur.
– Il est magnifique, n’est-ce pas ?
– C’est que, de ce côté de notre maison, les gouttières ont tendance à se boucher. Nous y retrouvons de nombreux branchages et feuilles mortes.
– Oui, je connais… Une maison nécessite un entretient permanent.
– Écoutez, je trouve qu’il surplombe fort notre maison. Et puis il est vieux. J’ai peur qu’il ne provoque des dégâts en cas de tempête. Avez-vous envisagé de l’abattre ?
– L’abattre ? C’est mon grand père qui l’a planté il y a soixante ans ! Il est en pleine santé, il est solide. Il ne bougera pas !
– Je ne vous laisserai pas dicter votre loi. Je vais faire intervenir les services de la commune.
– Vous avez raison, comme ça je pourrai leur parler de la magnifique piscine que vous avez creusée sans autorisation…
– Vous avez de la chance qu’une clôture nous sépare, sans quoi je vous ferais voir ma manière de penser !
– Et bien venez, je vous attends, mon portail est ouvert !
– C***ard !
– C’est ça, grand courageux va !

Source : www.espace-environnement.be

Toute ressemblance avec une situation que vous auriez vécue n’est absolument pas fortuite. En effet, il est fréquent que ce genre de conversation dégénère, selon un processus systématique.

  1. Les protagonistes échangent arguments et contre-arguments, chacun campant sur ses propres idées sans prêter la moindre attention à celles de l’autre. Or, l’un de nos besoins fondamentaux étant celui d’être compris – reconnus pour ce que nous sommes. Ce va-et-vient ne peut que tourner au vinaigre.
  2. À court d’arguments, l’un de protagonistes profère une menace à l’encontre de son rival. Une contre-menace s’en suit généralement.
  3. Les menaces ne faisant pas plier l’adversaire, elles font place à l’attaque verbale ou physique.

Comment faire pour ne pas se laisser emporter dans ce processus ? Il nous faut l’enrayer dès que nous prenons conscience que la bataille d’arguments s’engage.

  1. Comme nous sommes incapable de réfléchir lorsque submergés par nos hormones de stress, il est nécessaire de commencer par gérer nos émotions. Même si je me sens agressé, je suis alors capable de dépersonnaliser le comportement de l’autre. J’éviter de me demander « Qu’est ce qu’il/elle ME veut ? », mais bien « Qu’est ce qu’il/elle veut ? ».
  2. Je fais preuve d’empathie ; je prends en compte les émotions de l’autre. « J’ai le sentiment que tu es irrité/en colère/triste… » Cela lui permet d’être validé dans ce qu’il est, et éventuellement de vider son sac. Il est important d’être prêt à cette éventualité et de continuer à gérer ses propres émotions.
  3. Une fois que l’autre a pu exprimer pleinement son émotion, nous pouvons enfin impliquer la raison. Nous devons essayer de comprendre son point de vue, en lui posant des questions et en témoignant de notre compréhension en reformulant ses réponses : « Si je comprend bien, vous êtes irrité par le fait que vos gouttières soient régulièrement bouchées, inquiet par le fait que des branches pourraient endommager votre toiture en cas de tempête, et vous pensez qu’abattre cet arbre solutionnerait cette situation ? » Nous ne sommes pas nécessairement d’accord avec le point de vue de l’autre, mais nous lui témoignons de notre compréhension. Il se sent alors entendu et apaisé.
  4. Nous pouvons alors juxtaposer notre point de vue, en commençant notre phrase par « En même temps… », « De mon côté… », « De mon point de vue… », et en évitant à tout prix le MAIS. « De mon côté, je souhaite garder cet arbre. C’est sentimental, et puis il nous procure un ombrage bienvenu pendant les chaleurs de l’été. Toutefois, je suis disposé à me renseigner sur la possibilité de tailler certaines branches qui surplombent votre maison. » L’objectif est de trouver une solution qui satisfasse les deux parties.

Pour aller plus loin dans l’art de dénouer les conflits, je vous recommande l’excellent conte de Pierre Pellissier : Sept graines de lumière dans le coeur des guerriers.